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Le perroquet perdu et trouvé : Vos obligations légales

Par Me Stéphanie Cloutier, avocate

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Vous êtes-vous déjà demandé ce que vous feriez si, par un beau matin, vous trouviez le perroquet de vos rêves perché sur votre balcon? Après avoir nourri, abreuvé et mis à l’abri cette adorable boule de plumes, qu’en feriez-vous? La morale vous dicterait sans aucun doute d’entreprendre immédiatement des démarches dans le but de trouver son propriétaire légitime. Mais si ce jour-là, la morale n’était pas au rendez-vous et qu’il vous prenait l’envie de le garder tout simplement? Au-delà d’un devoir moral, croyez-vous que vous avez un devoir LÉGAL de retrouver le possesseur légitime d’un perroquet trouvé? La réponse est OUI !

Remarque : Cet article est fondé sur la législation et la jurisprudence du Québec seulement; il ne rend pas compte du régime juridique des autres provinces canadiennes.

En droit québécois, l’animal domestique est assimilé ni plus ni moins à un bien meuble, au même titre que l’est un bijou, une télévision ou un portefeuille. En cas de perte, ce sont alors les dispositions des articles 939 à 946 du Code civil du Québec qui trouvent application.

Tout d’abord, l’article 940 du Code civil du Québec énonce une règle claire et sans équivoque :

« Celui qui trouve un bien doit tenter d’en retrouver le propriétaire; le cas échéant, il doit lui remettre le bien. »

Maintenant, quelles sont les limites de cette obligation? Il y a effectivement un moment où vous pourrez légitimement devenir propriétaire du perroquet trouvé, mais vous devez d’abord accomplir différentes formalités et laisser s’écouler un délai pour permettre au possesseur légitime de se manifester. Par ailleurs, l’acquisition d’un bien par écoulement du temps, d’un perroquet dans ce cas-ci, ne peut jamais se faire sous le couvert de la mauvaise foi. La possession doit être publique. C’est donc dire que vous ne pouvez pas garder pour vous la découverte de ce perroquet, que vous souhaitiez ou non éviter que son propriétaire légitime puisse vous retrouver. En fait, c’est tout le contraire : vous avez le devoir légal de déclarer publiquement ce fait et ne pouvez simplement pas vous contenter de regarder vous-même les avis de recherche. L’article 941 énonce les différentes démarches que vous devez obligatoirement entreprendre pour tenter de retrouver le possesseur légitime :

1) Communiquez avec la SPCA de votre municipalité et/ou tout autre organisme pertinent, comme Perroquet Secours, pour leur rapporter que vous avez trouvé un perroquet;

2) Apposez plusieurs affiches sur les poteaux, dans les commerces et les cliniques vétérinaires de la municipalité dans laquelle a été trouvé le perroquet;

3) Publiez une annonce dans le journal de quartier ou sur des sites web de petites annonces classées (par exemple : les pacs, Kijiji);

4) Communiquez avec un agent de la paix. Cette dernière option, vous l’aurez compris, ne s’applique que si vous avez des raisons de soupçonner que le perroquet trouvé pourrait être lié à une enquête criminelle telle qu’un vol.

Après avoir entrepris l’une ou l’autre des démarches énoncées ci-dessus, vous ne deviendrez pas pour autant le véritable propriétaire dudit perroquet avant que ne s’écoule un long, très long délai. En fait, l’article 2919 du Code civil du Québec stipule que : « Le possesseur de bonne foi d’un [bien] meuble en acquiert la propriété par trois (3) ans à compter de la dépossession du propriétaire. » C’est donc dire que si, au cours de ce délai de trois ans, le possesseur légitime du perroquet se manifeste, vous n’aurez pas d’autre choix que de le lui remettre. En contrepartie, vous pourrez toutefois lui réclamer tous les frais de subsistance encourus durant la possession, à savoir la nourriture, les soins vétérinaires payés etc.

Si vous décidez de ne pas conserver le perroquet trouvé, la loi vous autorise à vous en départir avant la fin du délai de trois ans et ce, malgré que vous n’en soyez pas encore réellement propriétaire. Mais attention! Vous n’avez pas le droit de vendre, voire de donner ledit perroquet avant la fin d’un délai raisonnable à compter de la découverte, pour que le possesseur légitime ait eu toutes les chances de vous retrouver. Malheureusement, il existe peu de décisions judiciaires qui permettent de définir avec exactitude ce qu’est un « délai raisonnable » en pareille situation. Toutefois, à la lumière des propos tenus par le juge Gosselin dans la décision Perreault c. Société pour la prévention contre la cruauté envers les animaux (SPCA) de l’Ouest du Québec inc., 2006 QCCQ 6770 (CanLII), il semble approprié de suggérer une attente de 60 jours avant d’envisager la cession du perroquet trouvé.

Par ailleurs, il importe de savoir qu’une fois que le perroquet trouvé a été donné ou vendu à un tiers acquéreur, son propriétaire légitime perd malheureusement tout privilège de revendiquer directement son bien par la suite. À l’intérieur du délai de trois ans, il pourra réclamer tout au plus le prix de la vente (déduction faite des frais de subsistance et d’aliénation), à moins que le nouveau propriétaire ne consente librement à lui restituer le perroquet. Malgré cela, si le propriétaire légitime devait vous contacter à n’importe quel moment, vous êtes tenu de lui communiquer le nom et les coordonnées de la personne à qui vous avez donné ou vendu son perroquet.

En conclusion, sachez que si vous dérogez à ces dispositions du Code civil du Québec, vous vous exposez à des poursuites légales et pourriez alors être condamné à verser au possesseur légitime du perroquet une somme considérable en dommages matériels, moraux et punitifs pouvant facilement atteindre plusieurs dizaines de milliers de dollars. Voulez-vous vraiment prendre ce risque? Vous avez assurément fait une bonne action en accueillant sous votre toit ce perroquet perdu et en détresse. Si la tentation vous guette, rappelez-vous ceci : « Les [biens] meubles qui sont perdus […] continuent d’appartenir à leur propriétaire – article 939 C.c.Q » Puis, prenez un instant pour penser que quelque part, dans un foyer non loin de chez vous, il y a probablement quelqu’un en pleurs, un homme, une femme, un enfant, qui attend désespérément le retour de son compagnon.

[1] Si vous n’êtes pas intéressé à adopter ce perroquet ou à le vendre pour en tirer profit, vous pouvez en confier la garde à la SPCA de votre municipalité ou à tout autre organisme pertinent, comme Perroquet Secours, qui se chargera à votre place d’en prendre soin et d’en rechercher le propriétaire légitime. Vous aurez dès lors rempli toutes vos obligations légales.

Par Me Stéphanie Cloutier, avocate

« Le présent texte a été rédigé en tenant compte des textes législatifs et jurisprudentiels en vigueur dans la province de Québec seulement et ne reflètent pas l’état du droit dans les autres provinces canadiennes. »

© Tous droits réservés. Perroquetsecours, 2012.

 

The Lost and Found parrot: Your Legal Obligations

By Stéphanie Cloutier, Lawyer

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Have you ever wondered what you would do if on a fine morning, you found the parrot of your dreams perched on your balcony? Once this adorable bundle of feathers has been fed, watered and put in a safe place, what would you do? Obviously, morality would dictate that you start looking for its legitimate owner. But, what if you turned a deaf ear to the voice of ethics on that very day and chose to keep your find? Besides the moral responsibility, did you know that you are LEGALLY bound to look for the legitimate owner of your found parrot? YES indeed you are!

Note: This paper is based on the statutes and case laws in use in the province of Québec; it does not reflect the legal system of other Canadian provinces.

According to Quebec’s law, any domestic animal is considered no less than a moveable effect, in the same way a jewel, a TV set or a wallet are. In case of loss, the provisions set out in clauses 939 to 946 of the Civil Code of Quebec apply. First of all, the rule stated in clause 940 is clear and unequivocal:

“The finder of a thing shall attempt to find its owner; if he finds him, he shall return it to him”.

Is there any limit to this obligation? At some point you could legitimately claim ownership of the found parrot, provided you fulfill some procedures and after a certain period of time during which the legitimate owner can reclaim his property. Nothing, in this case the found parrot, can be acquired in bad faith through completion of an agreed period. In other words, you have to make public the finding of the bird in your possession. That is, if you find a parrot, you cannot keep it secret, whether or not you’d like to avoid being retraced by its legitimate owner. It’s quite the contrary actually: you are legally obligated to publish your find and you cannot merely peruse the wanted ads on your own. Clause 941 describes the various steps you must take in order to try and find the legitimate owner :

1) Contact your local SPCA and/or any relevant organisation, such as Perroquet Secours, to notify them that you have found a parrot;

2) Post several found notices on street poles, in merchants’ stores and animal clinics of the municipality in whose territory the parrot was found;

3) Publish a found notice in the local newspaper or in classified websites (such as lespacs, Kijiji, Craig’s list);

4) Contact a peace officer. This last option applies only if you have reasons to believe that the parrot you have found could have something to do with a criminal investigation, like in the case of a robbery.

Once you’ve taken any one of these steps, you still won’t become the genuine owner of said parrot before a very, very long time. According to Clause 2919 of the Civil Code of Quebec: “The possessor in good faith of movable property acquires the ownership of it by three years running from the dispossession of the owner”. In other words, if the owner shows up during that three-year period, you’ll have to hand the parrot over. In return, you can ask the owner to reimburse you for all the expenses incurred while keeping the parrot, such as food, veterinarian fees, and so on.

If you choose not to keep the parrot, the law allows you to dispose of it before the end of the three-year period, even if you’re not its real owner yet. But beware! You cannot sell the parrot, nor give it away before the end of a reasonable period of time after having found it, in order to give its legitimate owner full opportunity to retrace you. Unfortunately, they are few court judgements to help accurately define the duration of a “reasonable period” in such case. Nevertheless, in light of Justice Gosselin’s comments in his ruling of Perreault vs. Société pour la prévention contre la cruauté envers les animaux (SPCA) de l’Ouest du Québec inc., 2006 QCCQ 6770 (CanLII), it would seem appropriate to suggest a 60-day waiting time before considering to dispose of the found parrot.

It is also important to note that after the bird is given or sold to a third party, its legitimate owner losses any and all future privilege to claim it. At best, the owner has three years after losing his bird to claim an amount equal to the sale’s price (minus living and disposition expenses), unless the new owner freely agrees to return the parrot to him. Despite this, should the legitimate owner contact you at any time, you are obliged to give him the name and address of the person to whom the parrot was given or sold.

In conclusion, be aware that infringing these clauses of the Civil Code of Québec exposes you to legal action, and you could end up being condemned to pay material, moral and punitive damages that can easily reach several thousands of dollars. Do you really wish to take that risk? You most certainly did a good deed when you took in that lost and distressed parrot. If you are ever tempted to keep the bird, remember this: “A movable that is lost […] continues to belong to its owner”. (Clause 939 CCQ). If that is not enough, please consider that somewhere in a house closer that you’d think, someone in tears desperately awaits the return of his or her cherished companion.

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[1] If you do not wish to adopt the parrot you’ve found or to sell it for profit, you can bring it to your local SPCA or a relevant organization like Perroquet Secours; these organizations will take care of the bird and look for its legitimate owner. This way, you fulfill all your legal obligations.

Stéphanie Cloutier, Lawyer

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